Yangsheng : L'art de nourrir le principe vital (3e partie)

Comme nous l'avons déjà vu précédemment, ce qui est aujourd'hui connu du grand publique sous le terme Qigong (气功 :exercer le souffle), s'appelait autrefois "l'art de nourrir le principe vital" (养生术 / Yangshengshu) et existait en Chine dès le premier siècle avant notre ère.

Les premiers termes pour désigner ses techniques dont le but est la longévité furent Tuna (吐纳:cracher et avaler) ainsi que Xingqi (行气 :faire mouvoir le souffle) et semblent consister essentiellement en techniques de respiration profonde, comme le suggère le terme Biqi (闭气 :retenir son souffle).


Texte datant des royaumes combattants faisant mention du Xingqi (la graphie Qi est celle du feu sous la vapeur)




L'expression "Tuna" apparait déjà dans le chapitre 15 du Zhuangzi (env 300 av J.C) et désigne une technique qui consiste à "recracher le vieux pour absorber du neuf" (tugu naxin / 吐故纳新)attribuée aux pratiquant de Daoyin (导引, autre expression désignant l'art de la longévité).

L'étymologie du mot "Daoyin" est, d'ailleurs, particulièrement intéressante à prendre en compte car elle révèle un aspect des plus important de la pratique. Le premier des deux caractères que l'on pourrait traduire par "diriger" met en avant le fait de prendre le contrôle de toute action par la conscience. Le second caractère, "induire", pourrait en fait avoir changé de sens au cour de l'histoire car on le retrouve dans le Daoyintu de Mawangdui plutôt en rapport avec l'idée de guérir, de recouvrer la santé...





Vieux film montrant les moines Shaolin dans l'exercice statique sur les poteaux de bois




Ainsi les techniques de longue vie apparaissent très tôt dans l'histoire de la Chine mais l'exercice du zhanzhuang n'est cité explicitement dans aucun texte de l'antiquité. L'unique citation qui pourrait y faire référence nous provient du Huangdi neijing (le classique de l'ésotérisme de l'empereur jaune, 3e siècle av J.C) et se pose ainsi :

"Dans les temps anciens, il existait des hommes capables de comprendre les mystères du ciel et de la terre. Des hommes qui avaient saisi les principes du yin et du yang, de la respiration du souffle vital, capables de préserver leur esprit en solitaire, de ne faire qu'un de tous leurs muscles. Ils pouvaient, ainsi, vivre aussi longtemps que le ciel et la terre ... "

Or, le terme Zhanzhuang, étymologiquement, ne signifie pas "se tenir debout tel un pieu" mais "se tenir debout sur des pieux", un exercice provenant du monastère Shaolin consistant à utiliser des pieux de bois pour parfaire l'équilibre du pratiquant. Cet exercice se retrouve aujourd'hui dans différentes écoles de l'art martial, notamment l'école Meihua (fleur de prunier) et Hongjia (Hunggar / la famille Hong). L'exercice qui consiste à assumer une posture sur un laps de temps prolongé existe, quand à lui, au sein de l'école Xinyiquan / Xingyiquan.





Moines Shaolin sur les poteaux fleur de prunier (meihuazhuang)



Si l'art de nourrir le principe vital n'est en rien connecté à cet exercice de se tenir debout sur des pieux, le fait d'utiliser l'intention (yi /意)pour "prendre le contrôle afin d'induire un effet positif sur le corps" (Daoyin / 导引)relève bien de l'art du Yangsheng cité plus haut.

De plus, le fait d'utiliser l'intention (yi), qui relève de l'esprit (shen), pour guider le souffle (qi) afin d'induire un changement sur l'essence corporelle (jing) met en évidence l'axe verticale de l'homme. Cet axe ciel - sol que les chinois de l'antiquité ont utilisé pour créer la théorie des trois trésors.



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